Bertrand Alberge et les sculptures de coton
Cet artiste né de la photographie et du cinéma, s’attache à ses nombreux petits rituels du quotidien qui pourraient bien passer inaperçus. Cherchant toujours de nouvelles relations aux matériaux, Bertrand Alberge s’appuie sur une riche mémoire tant elle est nourrie d’expériences cinématographiques, de plans séquences comme de l’atmosphère du jour ou encore de matières récupérées et de trouvailles comme le passepoil devenu matière de prédilection pour ces sculptures de coton. Il travaille aujourd’hui en /le volume formé/tissé à partir de cordons de coton.
Cordon fil, ou cordon lanière, les fils colorés deviennent matière de couleur pour des jeux d’ombre et de lumière. Les surfaces arrondies se montent sur le vide, tel le derviche, elles s’ouvrent, se fendent, se resserrent, s’emboîtent. Coudre le cordon telle une contorsion du temps dans l’espace (comme) pour représenter le déroulement d’une vie, dit-il.
Bertrand ALBERGE présente des séries de sculptures aux formes douces, sensuelles et puissantes, de format intimiste ou monumental, naturalistes ou abstraites.
Le passepoil tel un cordon ombilical qui serait lié à sa mémoire, en passant par ses mains, une mémoire affective ? Sans doute, pour une des toutes premières forme aboutie, forme couplée, comme une mère à l’enfant douce lueur de l’intérieur.
Le geste répétitif et obsessionnel de coudre ensemble le cordon, ligne par ligne, tour après tour, pour d’abord obtenir un(e)… (trait de couleur, ligne, … trouver bon mot) et lui donner forme. Comme sur un tour de potier former par le cercle, sur le vide, vide qui parfois s’ouvre sur la surface en bouche souriante, s’emboîte sur un sommet (de stupa), sur une forme derviche. Lovée, cachée de/à l’intérieur, forme couplée par l’intérieur, comme un corps protégé ? Métaphore serait organique ou végétale? Sans dessin préparatoire ? La forme est-elle dans ta tête? Dans tes mains? La main guide le cordon dans la machine (Anita B2) modèle le passe poil par le fil, lui donne de la couleur, superpose les fils de couleur pour faire jouer la lumière. Modeler les cordons selon la tension du fil.
Enrouler, bobiner, embobiner, rembobiner.
Former, façonner, confectionner.
Configurer, proportionner, équilibrer.
La forme, souvent ronde, montante, pyramidale, s’enfle, se tend, s’enroule aussi sur elle même, parfois s’amollit, s’avachit si le fil est moins tendu, joue de l’ombre par de légers creux, renflements, elle englobe un vide, elle embrasse la lumière. La ligne rouge vient souligner la forme, enluminé la surface blanche; ces formes là sont géométrisées, les contours plus tendus, formes simplifiées en deux parties comme un contenant, un petit coffre à trésor plutôt qu’une vulgaire boîte ; un trésor plein de promesses.
Je vois des formes anthropomorphiques, féminines et / ou masculines; moins un fragment anthropomorphiques qu’une forme vase réceptacle englobante, une partie support embrassant une autre qui repose. Il y a des vases, des contenants que je ressens féminins, comme un beau réceptacle prêt à recevoir un doux contenu. Il y a des cônes qui se dressent, érectiles, comme poussés par des forces intérieures et ces jolis seins doux et rigolos.
Florence Gabriel